Séparée depuis deux ans, Nadine aimerait bien redevenir propriétaire. Mais en utilisant le régime d'accès à la propriété (RAP), risque-t-elle d'hypothéquer sa retraite ?
LE PROBLÈME
« J'ai 51 ans, alors il me reste moins de temps à travailler que j'en ai déjà eu, note Nadine. Il vaudrait peut-être mieux faire fructifier mon épargne que d'acheter une maison. Mon coeur veut avoir son chez-soi, mais ma tête doute que ce soit une bonne idée. Ça me chicote d'avoir une hypothèque sur 25 ans. Je n'aurai plus les mêmes revenus à la retraite. »
Résidante de la Mauricie, elle estime pouvoir dénicher une petite maison ou un jumelé pour de 125 000 à 150 000 $. « Un condo représente des sacrifices, car on n'a pas de cour et on ne peut pas toujours faire ce que l'on veut non plus, souligne-t-elle. Mais je pourrais le considérer quand même pour réduire les coûts. »
Jusqu'en 2016, Nadine était copropriétaire d'une maison avec son ex-conjoint. Elle ne pourra donc pas profiter du RAP avant trois ans. « Est-ce que d'attendre pour en profiter serait vraiment une bonne solution ? », demande-t-elle. Elle possède aussi une police d'assurance vie dont la valeur de rachat est de 11 000 $. C'est une autre option qu'elle considère pour financer son projet.
Nadine fait aussi quelques travaux en marketing et traduction pour une amie. Cela lui procure un revenu d'appoint de 1000 à 2000 $ par année. C'est une activité qu'elle aimerait maintenir et peut-être accroître une fois à la retraite.
D'ailleurs, Nadine souhaite conserver sensiblement le même train de vie à la retraite. « J'ai voyagé pas mal quand j'étais jeune, note-t-elle. J'aimerais bien pouvoir le faire encore à la retraite. J'ajouterais peut-être 3000 $ par année à mes dépenses pour ça. »
LES CHIFFRES
Revenu : de 56 000 $ à 57 000 $ par année
Régime enregistré d'épargne retraite (REER) : 45 000 $ (300 $ par mois)
REER de la FTQ : 15 200 $ (40 $ par paie)
Compte d'épargne libre d'impôt (CELI) : 5300 $
Valeur de rachat de sa police d'assurance : 11 000 $
Prestations du régime de rente du Québec (projetées) à 65 ans : 878 $
Dépenses fixes : 1200 $ par mois
LA SOLUTION
Nadine a raison de s'inquiéter des conséquences de l'achat d'une maison sur sa retraite. Elle a relativement peu d'épargne jusqu'à maintenant. « L'achat d'une maison, c'est un choix de style de vie, rappelle Christian Paré, planificateur financier chez Aisance Gestion de patrimoine. Par contre, d'un point de vue strictement financier, ce n'est pas la meilleure chose à faire pour elle. »
Si elle achetait une maison de 150 000 $ dont la valeur grimpait de 2,5 % par année, celle-ci vaudrait 300 000 $ dans 25 ans. Elle pourrait avoir de meilleurs rendements à long terme en investissant, selon M. Paré. D'autant plus qu'une maison entraîne beaucoup de dépenses au fil des ans : taxes municipales et scolaire, entretien, rénovations, etc. Partir à la retraite avec une hypothèque à payer n'est pas l'idéal non plus.
HYPOTHÈQUE
Cela étant dit, Nadine pourrait décider d'aller de l'avant malgré tout. « Une maison de 150 000 $ est le maximum qu'elle pourrait se payer si elle veut arriver, indique M. Paré. Elle devrait alors avoir une mise de fonds d'un minimum de 5 %, soit 7500 $. Elle devrait donc payer la prime d'assurance de la Société canadienne d'hypothèques et de logement (SCHL). Celle-ci s'élèverait à 5700 $. L'hypothèque serait donc de 148 700 $, ce qui représente 820,67 $ par mois pendant 25 ans. Évidemment, le chauffage, l'électricité et les taxes ne sont pas inclus. C'est possible, mais ça va prendre un bon budget. »
De plus, Nadine a raison de penser qu'elle devra attendre pour utiliser le RAP étant donné qu'elle a déjà été propriétaire. De toute façon, M. Paré lui déconseille cette stratégie pour sa mise de fonds. « Si elle retire 25 000 $ de ses REER avec le RAP, elle devra le rembourser sur 15 ans en plus de son hypothèque, rappelle-t-il. De plus, l'argent retiré ne générera plus de rendement pour sa retraite. »
Compte tenu de la marge de manoeuvre que Nadine dit avoir dans son budget, il serait préférable pour elle d'épargner pour avoir sa mise de fonds. Utiliser la valeur de rachat de son assurance vie n'est pas une mauvaise idée non plus. Mais elle doit d'abord faire une analyse rigoureuse de ses besoins en assurance, avertit M. Paré.
RETRAITE
Quant à sa retraite, Nadine n'aura pas les moyens de la prendre totalement à 65 ans. Pas avec son taux d'épargne actuel, du moins. « Dans un premier scénario, il faudrait qu'elle augmente son épargne d'au moins 2 % par année, qu'elle travaille jusqu'à 67 ans et qu'elle ait un revenu d'appoint de 3000 $ par année indexé jusqu'à 72 ans, estime M. Paré. Elle devrait également reporter ses demandes de prestations au régime de rente du Québec [RRQ] et de la pension de la Sécurité de la vieillesse [PSV] à 68 ans. »
En retardant ses demandes, les sommes qu'elle recevra seront donc bonifiées. À 68 ans, elle obtiendrait donc 17 608 $ par année de la RRQ et 11 313 $ de la PSV. Si elle fait sa demande à 65 ans, les sommes seraient respectivement de 13 396 $ et 8877 $. Ces deux années de report lui permettront d'avoir 70 % des revenus dont elle bénéficiait durant sa vie active jusqu'à l'âge de 95 ans plutôt que 86 ans.
Si elle souhaite vraiment abandonner son emploi principal à 65 ans, elle pourrait aussi le faire. Elle devrait augmenter son revenu d'appoint à 15 000 $ par année de 65 à 72 ans.
Comme elle n'aura plus à épargner pendant sa retraite, cela dégagera aussi une marge de manoeuvre supplémentaire dans son budget.
Bref, Nadine devra prendre le temps de bien réfléchir avant de prendre une décision. Louer une petite maison pourrait aussi être une option intéressante si elle veut avoir accès à une cour.
Rodrigo Bustos
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