Dépenser toutes ses économies avant sa mort est un risque important pour de nombreux retraités. D'où l'importance d'ajuster le tir avant de dire au revoir au marché du travail. Les choix à faire peuvent toutefois être difficiles.
Réjean jongle avec les chiffres depuis un bon moment. Âgé de 61 ans, il a l'intention de prendre sa retraite en juin prochain. « Il y a quelques années, l'usine pour laquelle je travaillais a fermé et j'ai perdu mon emploi, raconte-t-il. Le poste que j'occupe depuis est moins payant, mais j'ai de belles conditions. Par contre, ma conjointe veut quitter la région pour retourner sur la Rive-Sud de Montréal. Je n'ai pas envie de me trouver un nouvel emploi là-bas et de perdre mon temps dans la circulation. »
Le couple a mis de côté de l'argent dans un compte d'épargne en vue de son déménagement. Il envisage également d'utiliser la totalité de ses comptes d'épargne libres d'impôt (CELI) comme mise de fonds pour l'achat d'un condo. « C'est l'argent que nous avons obtenu après la vente de notre maison l'an dernier », explique Réjean.
Actuellement, les conjoints habitent en appartement. Le loyer est de 1000 $ par mois, chauffage et électricité inclus. Ils aimeraient trouver un condo d'environ 230 000 $ afin de maintenir, ou encore mieux de réduire, les frais de logement.
Mais Réjean est inquiet après avoir fait des simulations avec des outils de planification en ligne. Selon celles-ci, il aura épuisé toute son épargne à 77 ans ! À son avis, une espérance de vie de 85 ans serait plus réaliste. Mais où trouver l'argent nécessaire ? « J'ai des placements qui sont à 85 % en actions et à 15 % en obligations, explique-t-il. Je sais qu'à mon âge, c'est déconseillé. Par contre, il faut que je risque un peu pour avoir des rendements à court terme pour arriver. » Il note toutefois être préoccupé par les derniers soubresauts boursiers.
Depuis quelques années, il a commencé à « désimmobiliser » son compte de retraite immobilisé (CRI) pour investir l'argent dans son régime enregistré d'épargne retraite (REER). Il compte d'ailleurs retarder sa demande au Régime de rentes du Québec (RRQ) à 63 ans et bénéficier du retrait pour revenu temporaire du CRI. Il demandera sa pension de sécurité de la vieillesse à 65 ans. Sa conjointe, elle, compte prendre sa retraite à 62 ans.
Salaire de Réjean (61 ans) : 62 000 $ par année
REER : 255 000 $
CRI : 194 000 $
CELI : 53 000 $
RRQ : 890 $ (65 ans)
Revenu net souhaité à la retraite : 39 000 $
Compte d'épargne (en vue du déménagement) : 30 000 $
Salaire de la conjointe (57 ans) : 43 000 $ par année (45 000 $ après le déménagement)
REER conjoint : 93 000 $
REER : 24 000 $
CRI : 35 000 $
CELI : 54 000 $
Fonds de pension : 6550 $ par an (62 ans) ou 9080 $ par an (65 ans)
RRQ : 646 $ (65 ans)
Revenu net souhaité à la retraite : 23 000 $
Dans ses calculs, Réjean n'avait pas tenu compte de la situation de sa conjointe, car sa retraite est plus éloignée. Par contre, même avec les données de celle-ci, le résultat est inchangé : il manquera d'argent vers 77 ans. Il devra donc faire des compromis pour maintenir son train de vie.
Acheter une propriété comporte une part d'émotions, et c'est un choix de style de vie. Cependant, il serait probablement plus avantageux financièrement pour le couple de rester locataire, indique Bruno Therrien, planificateur financier chez IG Gestion de patrimoine. « Ils auraient un plus gros pécule entre leurs mains et cela leur donnerait de la flexibilité », indique-t-il. Réjean arriverait à 92 % de son objectif en payant 1000 $ de loyer par mois et en conservant son CELI pour sa retraite. Avec son projet de condo, il est à 88 %.
Autre option : réduire la mise de fonds à 20 % du prix d'achat. Le reste du CELI resterait investi pour la retraite. « On améliorerait un peu la situation, puisque Réjean serait à 89 % de son objectif », calcule M. Therrien. L'hypothèque serait toutefois plus élevée, soit 919 $ par mois ! Et il ne faut pas oublier les taxes municipales et scolaires, les charges de copropriété, les possibles rénovations, etc.
De plus, M. Therrien remet en question l'objectif de Réjean. « Selon l'Institut québécois de la planification financière, mieux vaudrait prévoir une espérance de vie de 90 ans », explique-t-il.
M. Therrien recommande également à Réjean de revoir son profil d'investisseur avec un planificateur financier. Si les récents soubresauts boursiers le préoccupent, c'est peut-être parce que ses investissements sont mal adaptés à son profil.
« Il n'a encore rien vu, prévient-il. La question n'est pas de savoir si ça va baisser, mais quand. »
La stratégie de Réjean de transférer une partie de son CRI vers son REER est bonne, estime le planificateur financier. Cela lui permettra d'avoir davantage de flexibilité quant à ses retraits.
Finalement, le moment venu, le couple pourrait bénéficier de stratégies de décaissement, comme le fractionnement de revenu. « Ça ne fera toutefois pas une différence majeure dans leur situation », note M. Therrien.
Évidemment, Réjean pourrait aussi envisager de se trouver un nouvel emploi afin d'augmenter son épargne retraite. « Ça lui permettrait possiblement d'atteindre ses objectifs, indique M. Therrien. Dans le contexte de pénurie de main-d'oeuvre, il pourrait certainement se trouver un emploi à temps partiel s'il veut réduire le rythme. »
Continuer à travailler permettrait à Réjean de bénéficier du crédit d'impôt provincial pour les travailleurs d'expérience. « Ce n'est pas énorme, mais c'est une exemption d'impôt de 750 $ », souligne M. Therrien.
Sinon, la seule option du couple sera de réduire ses dépenses à la retraite.
Source: La Presse
Rodrigo Bustos
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